En tant que repreneur d’entreprise, vous serez obligé à un moment de votre parcours de rédiger une lettre d’intention (autrement appelée “letter of intent” ou “LOI”).
Dans cet article, nous vous expliquons le rôle de la lettre d’intention et ce qu’elle doit absolument contenir.
À quoi sert la lettre d’intention (letter of intent) ?
La lettre d’intention est le document officiel qui vous permet de formaliser votre intérêt pour le rachat d’une entreprise.
Si vous avez déjà fait affaire dans l’immobilier, c’est, d’une certaine manière, un document ressemblant au compromis de vente.
À la différence près que la lettre d’intention n’est pas engageante. Vous pouvez manifester votre intérêt à une certaine date mais vous rétracter plus tard pendant le processus des négociations.
Cependant, pour pouvoir se rétracter, il faut rédiger correctement votre lettre d’intention, mettre en place les conditions suspensives nécessaires et définir le cadre pour pouvoir sortir du deal.
Nous développerons ce point un peu plus loin dans cet article.
Quel doit être le contenu de la lettre d’intention ?
Puisque c’est un document officiel, toutes les lettres d’intention contiennent à peu près les mêmes informations et les mêmes rubriques. Nous vous présentons ici le modèle que nous considérons être le plus pertinent.
Par ailleurs, si vous souscrivez à notre formation Reprise d’entreprise, vous obtiendrez, avec les vidéos des différents modules, un modèle de lettre d’intention que vous n’aurez qu’à adapter à votre propre projet.
En introduction
Comme pour n’importe quelle lettre, vous devez mettre un en-tête avec votre nom, votre prénom.
Vous devez indiquer à qui s’adresse cette lettre ainsi que l’objet (lettre d’intention pour la reprise de telle entreprise).
Poursuivez avec un texte de cet ordre :
À la suite de nos récents échanges dont nous nous félicitons de la qualité, nous vous remercions de nous permettre d’étudier l’opportunité d’acquérir le contrôle de la société (nom) située à (adresse), ci-après dénommée la “cible”.
Sur la base de la véracité des informations que vous nous avez fournies, nous avons le plaisir de vous confirmer notre intérêt pour procéder à l’acquisition de la Cible, sous les réserves et conditions suspensives détaillées dans la présente.
1/ Présentation du repreneur (vous)
Ensuite, vous pouvez faire une présentation sommaire de votre parcours professionnel et mieux faire comprendre au cédant pourquoi vous vous intéressez à son entreprise.
Vous pouvez mettre en avant vos compétences, vos expériences professionnelles pertinentes, etc.
Exemple : après 10 années d’expérience professionnelle dans le secteur d’activité, vous avez décidé de mettre votre compétence au service d’une entreprise à reprendre.
2/ Votre projet pour l’entreprise cible
C’est le moment de placer la focale sur l’entreprise du cédant. Vous devez expliquer ce que vous souhaitez faire de son entreprise après la reprise.
Par exemple, maintenir l’activité exactement comme elle est au moment de la vente, ajouter quelques changements mineurs, effectuer des synergies avec votre entreprise actuelle, changer drastiquement de cap, etc.
3/ Le périmètre de l’acquisition
Le périmètre de l’acquisition désigne ce que vous souhaitez acheter et comment vous comptez le faire.
Vous devez notifier le nombre de parts du capital social que vous souhaitez acquérir (100% la plupart du temps).
Si les locaux sont également en vente et que vous voulez les acheter, vous devez également le mentionner.
Enfin, vous devez préciser si vous souhaitez passer par une société tierce ou non (une SCI, ou autre).
4/ Le prix d’acquisition
Ensuite, vous devez expliquer votre offre, c’est-à-dire son montant et le délai de paiement que vous proposez. Plus vous êtes précis, mieux c’est. Ne lésinez pas sur les détails !
Nous vous encourageons même à détailler au maximum les différents calculs qui vous poussent à vous positionner sur ce montant précis.
Vous pouvez donc expliquer la trésorerie nette et comment vous l’avez calculée.
Voici un exemple de formule :
Somme des ([Trésorerie disponible en banque] + [Placements] + [Créances] + [Stock de marchandises aux prix d’achat fournisseurs])
diminuée des [Emprunts] + [Dettes fournisseurs] + [Dettes fiscales] + [Dettes sociales] + [Impôt sur les sociétés] + [Produits constatés d’avance].
Tous ces éléments devraient être soumis à votre connaissance lors de vos différents échanges avec le cédant et le broker. N’hésitez donc pas à utiliser au maximum ces informations pour faire l’offre la plus pertinente et la plus avantageuse pour vous.
Évidemment, faites-vous accompagner par un expert-comptable (spécialisé dans les reprises d’entreprise ou qui en a déjà effectué plusieurs, si possible).
Important : dans vos calculs, prévoyez l’évolution de la trésorerie nette. Si elle baisse, le prix de vente doit également baisser ! Par exemple, si vous constatez qu’une partie du stock répertorié est inutilisable, la valeur de l’entreprise diminue, votre prix doit faire de même.
5/ Les conditions suspensives
Les conditions suspensives doivent être levées pour que votre offre soit valable. On peut les trier en plusieurs catégories :
les conditions de financement : dans la plupart des cas, vous aurez besoin d’un prêt bancaire pour pouvoir vous permettre la reprise de l’entreprise. Pour pouvoir maintenir votre offre, vous devez donc trouver une banque qui vous accorde ce prêt.
les conditions d’audit : le deal ne peut être conclu que si tout ce que vous a dit le cédant à propos de son entreprise est vrai. Cela vous permet de vous retirer si le cédant n’est pas sérieux dans sa démarche ou qu’il essaie de vendre son entreprise à un prix bien plus élevé que sa valeur réelle. Pensez donc bien à vérifier tous les points les plus importants comme le stock, les données fiscales et comptables, le listing des clients et des fournisseurs, l’organigramme, etc.
les autres conditions : vous pouvez ajouter d’autres conditions comme imposer une rencontre avec le banquier de l’entreprise, organiser une rencontre avec chaque salarié et leur exposer votre projet, vérifier les points du bail si vous louez les locaux de l’entreprise, etc. À vous de voir quels points vous souhaitez sécuriser et qui pourraient être rédhibitoires à la transaction s’ils n’étaient pas validés.
6/ Vos conseils
Vous devez préciser qui sont les personnes habilitées à vous accompagner tout au long du processus d’achat.
Généralement, vous aurez besoin d’un professionnel du droit (généralement un avocat) pour la rédaction de la documentation juridique et d’un expert-comptable pour la partie Due diligence (c’est-à-dire l’audit de l’entreprise).
Vous devez ainsi renseigner leurs noms, prénoms et adresses.
7/ Une proposition de calendrier
Vous devez ensuite proposer un calendrier pour tout le déroulé de l’opération.
Vous devez spécifier une date précise pour chacune des étapes suivantes :
La validité de l’offre : souvent, on laisse entre 1 et 2 semaines au cédant pour qu’il puisse examiner l’offre en détails et la considérer ;
La levée des conditions suspensives : pour cette étape, une période plus ou moins longue est conseillée selon la nature des conditions suspensives. Par exemple, on peut se laisser deux mois pour trouver un financement et lever la condition suspensive de financement. Un mois peut suffire pour lever celle d’audit. Là encore, à vous de déterminer ce qui est le mieux pour vous sans trop faire patienter le cédant ;
La signature de l’acte de cession : généralement, on laisse entre trois et quatre mois, de manière à ce que l’affaire ne traîne pas trop dès lors que les conditions suspensives sont réunies et que le montage financier est accepté par le cédant. Sachez que plus le délai d’attente est long, plus le cédant est susceptible de s’inquiéter et de s’impatienter. À vous de trouver le bon équilibre, de bien jauger selon les discussions que vous avez avec lui et comment vous vous débrouillez par ailleurs pour ficeler tous les détails de l’opération.
Dans tous les cas, vous devez proposer un calendrier cohérent avec des délais acceptables et réalistes.
8/ La clause de confidentialité
Il existe trois clauses indispensables dans toute lettre d’intention.
La première concerne la confidentialité. Vous devez montrer votre bonne foi et vous engager à ne divulguer aucune information se rapportant à la société et à son rachat pendant une période donnée (généralement 5 ans maximum).
9/ La clause d’exclusivité
La deuxième clause concerne l’exclusivité.
En la signant, le cédant s’engage à :
ne pas mener des pourparlers avec d’autres acquéreurs potentiels ;
ne pas offrir à la vente ni céder tout ou une partie du capital ou des actifs de la société ciblée ;
ne pas suspendre ou rompre les négociations ;
ne pas entreprendre toute action de nature à faire obstacle à l’acquisition.
10/ La clause de non-concurrence
La dernière clause concerne la non-concurrence.
Vous ainsi que le cédant devez vous engager à ne pas lancer de société directement concurrente à la société cible pendant une certaine durée et un secteur géographique.
Exemple : si vous rachetez une boulangerie à Saint-Étienne, le cédant de celle-ci n’a pas le droit d’ouvrir une boulangerie dans la même ville (voire aux alentours, selon les termes de la clause). S’il le faisait, cela pourrait grandement nuire au développement de votre commerce puisqu’il entrerait en concurrence directe avec vous, en connaissant des données sensibles comme vos clients, votre savoir-faire, votre chaîne de production, etc.
Il est donc impératif de penser à cette clause de non-concurrence.
11/ La juridiction compétente en cas de conflit
Vous devez ensuite préciser sous quelle juridiction vous êtes soumis en cas de conflit. Pour la plupart des cas, ce sera la justice française.
12/ Les signatures
Enfin, vous devez laisser un espace pour votre signature et celle du cédant. Comme pour tout document officiel, vous devez faire des signatures authentiques et préciser votre nom, prénom ainsi que la date.
Conseils pour bien rédiger la lettre d’intention
Soyez concis et clair
Ne vous mettez pas de pression inutile quant à la longueur de vos différentes rubriques. Ne faites surtout pas de remplissage, allez simplement à l’essentiel !
Parfois, deux lignes suffisent pour dire l’essentiel, et c’est très bien !
Faites attention à l’orthographe
C’est une évidence mais pour paraître plus crédible et professionnel, faites attention aux fautes d’orthographe.
Quand on rédige quelque chose, les oublis ou les inattentions peuvent être fréquentes, même quand on n’a pas de lacune linguistique.
Pensez donc à vous relire (ou vous faire relire) pour éviter de faire glisser des fautes dans votre lettre d’intention.
Utilisez un ton professionnel
Pour gagner en crédibilité, restez formel et respectueux tout au long de votre lettre, même si vous avez tissé une relation de confiance et de sympathie avec le cédant.
Gardez à l’esprit que la lettre d’intention est un document sérieux et officiel !
Après la rédaction de la lettre, quel protocole suivre ?
Une fois que vous avez terminé la rédaction, vous devez penser aux prochaines étapes :
la relecture : on l’a déjà évoqué, soyez certain que votre lettre ne comporte aucune coquille ou information erronée ou approximative ;
la préparation des documents annexes : notamment les documents financiers ;
l’envoi et le suivi de la lettre d’intention ;
la réunion pour que les deux parties puissent négocier : si votre offre est acceptée, vous serez amené à participer à une ou plusieurs réunions pour discuter des différents termes ;
la due diligence (ou audit) : vous devez ensuite mettre en place une équipe pour effectuer l’audit complet de l’entreprise cible et lever progressivement les différentes conditions suspensives. Ce qui conduira à une avancée sérieuse dans le processus de reprise ;
la nouvelle phase de négociations avec les ajustements suite aux différents audits ;
la rédaction de l’accord définitif : les termes de la vente peuvent évoluer selon les différents points soulevés par l’audit. Vous devez alors mettre à jour, avec le cédant, la nouvelle offre et vous mettre d’accord sur celle-ci ;
la signature et les formalités légales pour conclure la transaction ;
l’intégration post-acquisition : vient ensuite la transition entre l’ancienne gestion et la vôtre. Pour vous aider dans vos nouvelles fonctions, vous serez accompagné par le cédant durant plusieurs semaines et mois.
Vous savez désormais comment rédiger une lettre d’intention pour valoriser au mieux votre projet de reprise d’entreprise !
Si vous avez encore des questions sur votre trajectoire de repreneur, n’hésitez pas à souscrire à notre formation. Vous y trouverez toutes les informations nécessaires pour créer le meilleur projet de reprise ainsi qu’un accompagnement personnalisé pour éviter de commettre des erreurs.